- Les problèmes observés sur le contexte de la classe
L’école où j’ai effectué mon stage IV accueille une clientèle majoritairement issue de familles de militaires. Parents et enfants sont en effet appelés à vivre des déménagements fréquents et rapprochés. Par conséquent, les enfants sont susceptibles de fréquenter, au cours de leur primaire, plusieurs milieux scolaires à travers le Canada. Parmi eux, certains parlent en anglais, mais peu savent l’écrire ou le lire.
À la lumière de ce qui précède, j’ai rapidement constaté que plusieurs de mes élèves vivaient bel et bien beaucoup d’instabilité familiale (parents militaires, parents séparés, parents ayant des jugements de la cour, etc.). Ce qui fait en sorte que les enfants arrivent parfois à l’école avec le cœur lourd. De plus, j’ai remarqué que certains élèves ont de fortes réactions émotionnelles lorsqu’ils font face à une difficulté scolaire. En fait, certains vont se mettre à pleurer ou à bouder, tandis qu’un d’eux va avoir des réactions plus colériques comme lancer son matériel par terre, s’assoir ou se coucher pour se défouler sur le sol, etc. À ce moment-là, recevoir l’aide des enseignantes constitue l’unique solution à leur problème. Bref, ils ne sont pas toujours en mesure de comprendre et de bien gérer leurs émotions. Ces réactions émotionnelles incontrôlées engendrent certaines répercussions sur leurs apprentissages et la dynamique du groupe. En fait, plusieurs élèves se sentent mal à l’aise vis-à-vis les comportements d’élèves perturbés émotionnellement. Ils ne savent plus comment réagir ce qui crée certaines tensions dans le groupe. Je trouve cela très préoccupant.
Dans un autre ordre d’idées, il s’agit d’un groupe pour qui la causerie matinale est une activité toute désignée. Les élèves adorent raconter leurs anecdotes personnelles et sentir qu’ils sont écoutés par leurs pairs. Certains d’entre eux apportent de la maison des photos, des objets ou des créations personnelles dans le but de les présenter à la classe. D’ailleurs, j’observe chez mes élèves un intérêt grandissant pour la littérature jeunesse. Au début de l’année scolaire, pendant la routine, je voyais qu’ils se choisissaient rapidement un livre, survolaient brièvement les pages et changeaient aussitôt de livre. Heureusement, la situation a peu à peu changé et s’est améliorée pour un bon nombre d’entre eux, au fil des semaines. Grâce à l’implantation de diverses activités orientées vers la lecture : l’auteur de la semaine, la lecture de petits livres à la maison, la lecture de saynètes, la lecture répétée, etc. Je surprends même des élèves à lire au retour de la récréation ce qui me fait chaud au cœur à chaque fois. En revanche, mon enseignante associée et moi nous nous questionnons énormément sur la compréhension en lecture de nos élèves. En fait, la majorité de nos élèves lisent encore syllabe par syllabe plutôt que par groupes de mots ou par unités de sens ce qui a bien souvent pour effet de limiter la compréhension des élèves. Sachant que la maitrise de la lecture est la base même du rendement de l’élève tout au long de sa scolarité et que la période sensible pour l’apprentissage de la lecture se situe entre quatre et sept ans, cet aspect est somme toute préoccupant. Les enfants ont besoin qu’on leur enseigne à comprendre, à interpréter et à utiliser les symboles de la langue écrite.
C’est pour ces raisons qu’un projet portant sur la gestion des émotions tout en intégrant la littérature jeunesse dans le processus était approprié pour ce milieu. Sans compter qu’un tel projet permettait de travailler en concert avec le projet éducatif de l’école puisqu’il tentait de répondre à certains de ces défis : l’instabilité émotive des élèves et le sentiment d’insécurité des élèves dus à la réalité militaire, aux exercices, aux cours, aux déploiements et aux transferts.
- La réflexion qui a conduit à mettre en oeuvre un projet d'intervention
Il faut savoir qu’un enfant qui a une bonne aptitude émotionnelle est conscient des émotions qu’il ressent et peut généralement les nommer ou les définir. Il comprend habituellement ce qui a causé l’émotion et il connait la meilleure façon d’agir pour gérer ladite émotion. De plus, l’enfant qui est apte à bien gérer ses émotions noue et entretient des relations saines, communique ouvertement et n’est pas sur la défensive, affronte les défis de manière positive et sans trop d’anxiété, est moins stressé et profite plus de la vie. Inversement, l’enfant qui n’arrive pas à gérer correctement ses émotions se retrouve « pris au piège » et ressent la même émotion chaque fois qu’une situation semblable se répète. La situation en question devient alors le déclencheur de l’émotion. Quand un enfant n’a pas appris à bien gérer ses émotions, il ne peut pas décrire ce qu’il ressent, parle rarement de ses émotions, ne demande pas d’aide et n’en attend pas s’il ne se sent pas bien, exprime ses émotions de façon inappropriée, par exemple en frappant, en criant ou en boudant, ne se rend pas compte qu’il est dominé par ses émotions. C’est pourquoi il est important de fournir à l’enfant des outils ou des moyens pour pallier à ces réactions négatives. (Potter et Jennings, 2016 ; p. 30-31)
- Les grandes lignes de mon projet d'intervention en contexte
Étape 1: Reconnaitre ses émotion
- Discutons de nos émotions
Cette activité a pour but d’amener les élèves à échanger sur leurs connaissances en lien avec les diverses émotions qu’ils peuvent vivre tout au long de leur vie.
Étape 2: Comprendre ses émotions
- Lecture interactive de l'album «La couleur des émotions» d'Anna Llenas
- À la rescousse du monstre des couleurs!
À l’école des monstres, le monstre des couleurs dévore plusieurs albums traitant des émotions. Toutefois, il n’arrive toujours pas à comprendre et à démêler les émotions suivantes : la joie, la tristesse, la colère, la peur et la sérénité. Le monstre des couleurs demande la collaboration des élèves afin de l’aider à se retrouver dans ce tourbillon d’émotions. Pour ce faire, chaque élève recevra de la part du monstre des couleurs un album de littérature jeunesse dans lequel le personnage principal vit une émotion de joie, de colère, de tristesse, de peur ou de sérénité. Ils devront tout d’abord lire seul l’album dans le but d’identifier l’émotion vécue par le personnage pour ensuite comprendre comment il la vécut, puis de quelle façon il est parvenu à gérer l’émotion en question. Finalement, les élèves qui auront travaillé la même émotion devront se réunir en équipe afin de discuter de leur album. Cette discussion prendra la forme d’un cercle de lecture. Ils devront ainsi faire ressortir les ressemblances et les différences à travers leur lecture. Quelques questions seront soumises aux équipes dans le but d’alimenter et d’enrichir leur discussion. Ces discussions avec différentes personnes contribuent à faire évoluer la compréhension des élèves et à les amener à nuancer leurs interprétations de l’émotion travaillée. À la toute fin de l’activité, un élève sera mandater par son équipe pour partager ses connaissances de l’émotion qu’ils ont exploré. Cette plénière a pour objectif de faire ressortir les informations pertinentes sur chacune des émotions travaillées à cette étape, en plus de donner le goût aux élèves de lire les albums traitant des autres émotions.
- Peux-tu me dire ce que tu éprouves?
Afin de bien cerner l’état d’esprit de mes élèves, ceux-ci seront invités à répondre à la question du monstre des couleurs, et ce, pendant la routine du matin et lorsqu’ils en sentiront le besoin : peux-tu me dire ce que tu éprouves? Pour répondre à cette question, ils devront tout simplement placer un bâton «popsicle» sur laquelle il est inscrit leur nom dans le bocal représentant la couleur de leur émotion.
Étape 3: Gérer ses émotions
- Confection d'une boîte à outils
- Présentation de la boîte à outils
- La nature des traces qui sont disponibles
Traces écrites de mes observations et de mes enregistrements audio/ Fiches de lecture des élèves/ Grilles évolutives /Photos
Les observations saillantes à travers les traces collectées
Au fil du projet, j’ai observé, de façon générale, une meilleure compréhension des émotions chez mes élèves et de meilleures attitudes face à l’erreur. J’ai vu plusieurs élèves utiliser les outils du coin calme pour régler les conflits survenus à la récréation et pour contrôle leur anxiété face à des situations stressantes (départ d’un parent, l’approche d’une évaluation, etc.). Finalement, certains élèves allaient changer de place leur bâton ce qui signifie qu’ils savaient qu’ils vivent différentes émotions pendant une même journée. En ce qui concerne la compréhension en lecture, ce projet m’a permis de cibler davantage les raisons de leurs difficultés en lecture (mots difficiles, niveau de lecture, décodage, etc.)
Bibliographie
Potter, M. et Jennings, S. La ronde des émotions. Toronto, Ontario : Éditions Scholastic, p. 30-31.
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fiche_evolutive.pdf | 190.6 Ko |
fiche_de_lecture_-_albums.pdf | 342.92 Ko |
fiche_du_lecteur_modelisation_-_tous_les_monstres_ont_peur_du_noir.pdf | 138.02 Ko |