Ève-Marie Prescott                                                                                                                      

L’émergence du projet

J'ai effectué mon dernier stage en enseignement au primaire et au préscolaire dans une classe de maternelle 5 ans comportant 21 élèves. J'étais à l’académie Sacré-Cœur, une école privée qui se situe à Saint-Bruno-de-Montarville. L’école fait la promotion de son projet éducatif qui met en valeur soit d’assurer une éducation intégrale de qualité, favoriser l’équilibre de vie ainsi qu’il valorise grandement l’apprentissage en nature puisque c’est un établissement « Child nature ». D’ailleurs l’ école est située directement sur un terrain de la Sépaq.

J'ai fait mon stage dans un milieu très favorisé. Sur mes 21 élèves, seulement deux commençaient l’année avec l’âge de quatre ans, les autres avaient déjà cinq ans. Je suis dans une classe où les élèves ont été majoritairement très stimulés, ils étaient intéressés et ils avaient déjà plusieurs connaissances au niveau académique. Par exemple, la grande majorité connaissait leurs nombres, les lettres de l’alphabet et ils savaient écrire leur nom. Certains élèves faisaient du violon sur l’heure du dîner, d’autres du yoga, de la danse, du basquet Ball où encore des cours d’échecs après l’école. En termes de comportement, il a été possible d’observer certains élèves qui rouspètent et qui testent l’adulte. Je constate aussi que certains élèves avaient quelques lacunes au niveau de la concentration sur une plus longue durée.

Dans les faits, mon enseignante associée et moi avions davantage observé des enfants qui pleurent rapidement lorsqu’une situation arrive où lorsqu’ils n’ont pas ce qu’ils veulent. Lorsqu’ils sont dérangés par un ami, ils viennent directement voir l’adulte et se plaignent à la place de tenter de résoudre leurs conflits, de mettre des mots sur ce qu’ils ressentent. Ils deviennent émotifs très rapidement et sans trop savoir pourquoi. Enfin, nous avions des cocos centrés sur eux-mêmes qui ne sont pas nécessairement habitués à observer et à écouter les autres, ou à ajuster leurs actions où leurs paroles lorsqu’une situation surgissait. Je peux alors confirmer qu’à la fois mon enseignante associée et moi avions soutenu qu’il serait primordial d’insister sur la thématique de la gestion des émotions dans le cadre de mon projet d’intervention en contexte. C’était le besoin prédominent dans notre classe. Mon enseignante associée affirmait aussi que le besoin de travailler la motricité fine demeure prioritaire. Il est important à ses yeux d’établir un climat de classe harmonieux, sécurisant et propice aux apprentissages.

En tant que stagiaire, je me considère très chanceuse de pouvoir exploiter ce thème afin de combler ce besoin important qu’éprouvent nos élèves, mais aussi beaucoup d’enfants d’âge du préscolaire. L’objectif d’apprendre à gérer nos émotions est un défi pour tous les êtres humains qui se doit d’être enseigné dès le plus jeune âge. Gueguen, C.(2015).  Je me suis servi de la littérature jeunesse de manière abondante afin d’exploiter les différentes émotions, la manière qu’elles sont perçues , qu’elles sont vécues et la manière de réagir. J'ai réinvesti quotidiennement les notions vues en grand groupe, et ce, par le biais des ateliers, des jeux de tables, des discussions et des interventions.

Personnes-ressources ;

Enseignante associée pour ses connaissances et son expertise

TES (consultant afin d’exploiter le projet à son plein potentiel )

Enseignante en musique

La réalisation du projet :

Objectif général : L’élève est en mesure de développer des compétences et des stratégies afin de mieux vivre en groupe dans un cadre scolaire et ultimement en société.

Mon projet d’intervention en contexte visait explicitement le domaine affectif, soit la compétence « construire sa conscience de soi » et plus particulièrement les composantes ; « reconnaître ses besoins, ses caractéristiques, exprimer ses émotions, réguler ses émotions et expérimenter son autonomie » (PFEQ, 2022).  Afin d’exploiter mon thème, j’ai rencontré le TES qui s’occupait des classes de préscolaire et j’ai échangé avec lui quant à mes idées d’activités et mes intentions pédagogiques. J’ai partagé l’importance que je porte à la réaction des élèves lorsqu’ils vivent une émotion, mais aussi leur manière de réagir vis-à-vis l’émotion d’autrui. Le TES m'a donné l’idée d’utiliser les marionnettes afin de permettre aux enfants de créer des mises en situation ou ils sont amenés à échanger entre eux en réagissant à différentes émotions, par exemple. Ainsi, j'ai pu observer les réactions des enfants lorsqu'une émotion est vécue, mais aussi la manière dont l’enfant perçoit cette émotion.

Par le biais de cette activité, j'ai questionné les élèves. Je leur ai demandé s’ils pensent que la marionnette à bien réagi et pourquoi et ce que la marionnette aurait pu faire pour retrouver son calme où pour respecter l’autre marionnette lorsqu’elle éprouvait de la colère, par exemple. . L’objectif était d’effectuer une rétroaction par le jeu de rôle.

Le TES est venu faire un atelier sur la reconnaissance des émotions dans toutes les classes du préscolaire, et ce, afin de faire du pouce sur mon projet. De plus, l’enseignante de musique  a aussi mis du sien en enseignant aux élèves la reconnaissance des intonations dans la voix et dans le chant. Ainsi, les élèves ont été davantage sensibilisés aux émotions et aux manières de les reconnaître, mais aussi de les partager.

Ce projet s'est déroulé sur trois semaines du mois de novembre, et ce, à partir du retour de la semaine de repos.

J’ai appliqué un sous-objectif par semaine.

·       Connaître des émotions.  1 semaine

Amorce : lecture de l’album la couleur des émotions.

Afin de se familiariser avec la définition du terme émotions et avec les différentes émotions présentées telles que la joie, la colère, l’amour, la sérénité, la peur et la tristesse, j'ai présenté l’album la couleur des émotions. Nous poursuivions avec une causerie afin d’explorer le sujet en profondeur. Ainsi, il a été possible d’observer les connaissances des élèves quant à ce sujet, mais aussi de permettre aux élèves de faire des liens concrets en utilisant des expériences de la vie réelle.

J'ai utilisé la littérature jeunesse tous les jours (deux lectures par jour) du mois afin de concrétiser la reconnaissance et la  compréhension des émotions et afin d’en discuter en grand groupe. Les enfants adorent le moment de la lecture de l’histoire, c’était donc un bon moyen pour motiver les enfants et faire en sorte qu'ils s'investissent dans la séquence. De plus, la littérature jeunesse m'a permis d’observer les enfants quant à leurs opinions qu’ils se font d’un récit, et ce, en lien avec les émotions.

Type de questionnement pendant les lectures : Pourquoi le personnage principal réagit-il de cette manière ? Quelle émotion penses-tu que la petite fille ressent ? Toi, crois-tu que le personnage à bien réagit ? Comment aurait-il pu réagir ou qu’est-ce qu’il aurait pu faire pour retrouver son calme ?

J'ai présenté le jeu la couleur des émotions : les élèves ont été amenés à partager des émotions qu’ils ont déjà vécues auparavant. Par la suite ils ont été invités à jouer au jeu pendant les temps libres (je joue avec les élèves – observation de la bonne association de sentiment avec la bonne émotion).

·       Reconnaître les émotions en observant les indices physiques ou les traits particuliers qui s’y rattachent. (1 semaine)

Présentation du dé des émotions : pendant la routine quatre enfants étaient pigés pour brasser le dé, lorsque le dé s’arrête, l’enfant nomme l’émotion qu’il aperçoit et il explique son choix en nommant les traits sur le visage.

Affiches avec différents visages vivant des émotions : ensemble nous avons regardé toutes les affiches et nous décortiquons l’émotion observée en nommant les traits visibles. Les affiches sont laissées à la disposition des élèves par la suite.

 Un miroir a été installé dans la classe pendant les temps libres. Les enfants pouvaient se regarder en tentant de représenter une émotion.

Livre des émotions : chaque élève a été pris en photo de manière individuelle, et ce, en représentant une émotion bien précise avec leur visage (5 élèves par émotions). Par exemple, un élève qui est « fâché » serrera les dents et froncera les sourcils. Sous la photo, il est écrit : je suis en colère quand : ______, ils écriront, avec aide, le reste de la phrase. Nous avons fait un livre commun avec toutes les photos. Les élèves ont adoré ce projet.

        ·  L’élève utilise des stratégies afin de réguler ses émotions et respecter celles des autres. (1 semaine)

Présentation de la routine de l’astronaute.

En grand groupe, sous la forme d’une causerie, nous avons déterminé notre thermomètre de la colère ( je me sens bien, je me sens moyen, je me sens mal) et nous avons associé aux émotions visées des stratégies qui peuvent nous calmer. Ensuite, j’ai affiché les résultats obtenus sous la forme d’une affiche dans notre coin calme.

Jeu de marionnette pendant les temps libres : L'objectif était de jouer avec un ou deux élèves à la fois et de leur proposer un scénario où je mets en valeur une émotion précise. Nous discutions de notre jeu et de la manière dont nos marionnettes ont réagi. Je questionne l’enfant. Je l’invite à m’expliquer sa pensée (rétroaction par le jeu de rôle). Les élèves ont aussi été invités à jouer entre eux. 

Plus précisément, cette situation d’apprentissage visait à permettre aux enfants de profiter de ces occasions pour reproduire leur réalité. L'enfant peut reproduire instinctivement ce qu’il connait, et ce en substituant sa réalité par le biais d’objets et d’actions exprimant ses besoins et ses désirs (Bouchard, 2019, p. 48).

L’observation de mon projet :

• Cahier de traces;
• Cahier de notes du jour;
• Grilles de consignation;
•  vidéos, photos;
• Affiches;
• Livres communs;
• Cercle de discussion;

Les questions que je me suis posées avant d'effectuer mon projet : 

• Est-ce que l’enfant saura se référer aux solutions proposées lorsqu’une situation émotive survient ?
• Est-ce que l’enfant est en mesure de reconnaître ses propres émotions et celles des autres ?
• Est-ce que l’enfant est en mesure de demander de l’aide lorsqu’il a épuisé ses ressources ?
• Est-ce que l’enfant est en mesure de respecter l’émotion de l’autre ?
• Est-ce que l’enfant est en mesure de bien différencier les émotions comme la tristesse et la colère ?

Les obstacles que j'envisageais lors de la création de mon projet :

Un enfant qui n’est pas en mesure d’appliquer les stratégies de résolutions de conflit ou de retour au calme où encore un enfant qui manque de confiance en soi et ne participe pas aux activités proposées ?

Afin de répondre au besoin de ses enfants, j’ai choisi de mettre en place le thermomètre de l’émotion et d'enseigner la routine de l’astronaute. L’enfant qui vit une émotion difficile comme la colère pouvait repérer son émotion et la manière d’y réagir à la fois.

 

Finalement, afin d’optimiser mes observations quant à l’atteinte de l’objectif général de ma séquence, j'ai laissé une grande fenêtre de temps libres aux élèves (minimum 1h45 par jour), et ce puisque, c’est en jouant que les enfants combinent leurs idées, leurs impressions et leurs intuitions avec leurs expériences et leurs opinions (Bouchard, 2019, p. 40). Dans les faits, c’est à l’âge du préscolaire que l’enfant, lorsqu’il joue avec ses pairs créent des jeux démontrant ce qu’il comprend de la complexité de son environnement. Il mettra en place des jeux de rôle et des jeux avec des règles précises (Boyd et Bee, 2017). Pour cela, les enfants doivent communiquer entre eux et faire des compromis. Ils doivent être en mesure de faire valoir leurs opinions tout en respectant celles des autres, car leurs conceptions du monde sont différentes en fonction de leurs expériences personnelles. C’est donc la meilleure manière d’obtenir des informations quant au développement des enfants en ce qui concerne leur gestion des émotions.

 

Références

Livres: 

Bouchard, C. (2019). Le développement global de l'enfant de 0 à 6 ans en contextes éducatifs (2e édition), Québec, Québec : Presses de l’Université du Québec.

Boyd, D. et Bee, H. (2017). Les âges de la vie (5e éd.). Montréal, Québec : ERPI.

Gueguen, C., (2015). Connaitre les étapes de la maturation émotionnelle des enfants pour mieux les comprendre et les accompagner. Repéré à : https://apprendreaeduquer.fr/connaitre-les-etapes-de-la-maturation-emotionnelle-des-enfants-pour-mieux-les-comprendre-et-les-accompagner/#:~:text=La%20partie%20du%20cerveau%20qui,%C3%A0%20partir%20de%205%20ans.&text=Un%20petit%20enfant%20vit%20les,d'intensit%C3%A9%20que%20les%20enfants.