Observations et mise en contexte
Mon stage s'est déroulé au préscolaire dans une école en milieu interculturel et défavorisé (cote de défavorisation de 10). Il va sans dire que bon nombre d’enfants arrivent alors à l’école en présentant plusieurs facteurs de risque, tant sur le plan familial qu’environnemental. De cette façon, la plupart des enfants commençaient leur parcours scolaire avec un faible bagage de connaissances et d’habiletés acquises ; la classe se trouvait donc à être très hétérogène en ce sens. Par exemple, certains faisaient encore plusieurs crises de larmes par semaine (même après un mois d’école), tandis que d’autres avaient déjà la capacité à se soucier du bien-être de leurs camarades en proposant verbalement aux autres de jouer avec eux.
Dès le début de l’année scolaire, il m’a donc été donné de constater que plusieurs lacunes chez les enfants avaient un impact direct sur le déroulement de la vie de classe. Par exemple, les habiletés sociales des enfants étant déficientes, il n’était pas rare que j’aie à intervenir à plusieurs reprises pendant les jeux libres pour aider les enfants à résoudre de petits conflits. Après réflexion, l’origine de ces conflits était assurément liée au manque de communication entre les enfants et à leur immaturité par rapport aux relations sociales. À titre d’exemple, certains leaders de la classe ayant de bonnes habiletés sur plusieurs plans de leur développement (en comparaison à leurs camarades) n’utilisaient pas leur qualités à leur plein potentiel et s’immisçaient dans le jeu des autres sans demander la permission et en imposant leurs propres règles.
Dans un autre ordre d’idées, une pluralité d’élèves dans la classe était consciente qu’ils éprouvaient certaines difficultés, ce qui jouait considérablement sur leur estime personnelle dans la réalisation de certaines tâches. Par exemple, certains avaient beaucoup de difficultés à terminer une activité puisqu’ils ne se sentaient pas capables d’y arriver Aussi, lors d’une activité de science, une enfant avait bien peur des conséquences rattachées au fait de ne pas donner la « bonne » hypothèse. Dans ce sens, le manque de vocabulaire était aussi au rendez-vous pour certains, notamment chez les enfants qui ne recevaient pas assez de stimulation à la maison. En début d’année, le mot « histoire » était d’ailleurs méconnu pour plusieurs enfants québécois.
Le projet
Afin de pallier ces difficultés particulières chez les enfants de ma classe, j'ai donc décidé d'instaurer une communauté de recherche philosophique (CRP). Bien avant de connaitre mon école associée pour le stage IV, j’avais envie de me lancer dans un tel projet pour expérimenter les savoirs acquis dans le cours « L’observation en philosophie pour les enfants ». Cependant, lorsque j’ai constaté que mon milieu de stage était particulièrement difficile sur plusieurs plans, j’ai vite abandonné mon idée première. Toutefois, après avoir fait l’état de mes observations et des besoins de ma classe, mon projet de CRP a refait surface sans que j’en sois vraiment consciente. Ce type de projet a pu les amener à développer des habiletés sociales, et ce, en tentant de les rejoindre par l’outil principal de la CRP, soit la littérature.
Retombées du projet
Mon projet a été étalé sur six périodes à raison d’une par semaine. Les périodes étaient de 40 minutes maximum, incluant la lecture de l’histoire ainsi que la période de discussion (voir le document de déroulement type d’une période de philosophie). Dans les périodes de discussion suivant l’histoire, les enfants pouvaient poser des questions sur les éléments de l’album qui avait été plus ou moins bien compris. Dans les débuts, il était difficile pour les enfants de combler toute la « place » qui leur était donnée pour discuter. Le manque d’estime de soi (ou la gêne), le manque de vocabulaire ou le fait que l’activité soit trop exigeante sur le plan cognitif pour certains contribuaient à rendre les discussions parfois difficiles à avancer. Cependant, à force de rappeler les règles de discussion prônant le respect et l’ouverture, de modéliser la formulation de questions et de multiplier les encouragements verbaux, des progrès s’en sont suivis. En effet, les enfants qui n’étaient pas capables de suivre le fil de la conversation et qui avaient peu de vocabulaire dans les débuts de la CRP levaient maintenant la main pour intervenir. De même, ceux qui étaient plus avancés que les autres sur le plan cognitif pouvaient pousser leur réflexion plus loin. Il va sans dire que très souvent, ces enfants étaient freinés lorsqu’ils donnaient toutes les réponses pour l’ensemble du groupe (notamment lors d’activités de dépistage en orthophonie) ; la CRP était donc d’une belle occasion de nourrir leur envie de partager leurs idées. En bref, les progrès de plusieurs enfants ont été significatifs, particulièrement en ce qui concerne la volonté de partager son opinion avec les autres et l’adoption de valeurs de respect et d’écoute liées à l’action de communiquer.
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